Les Français ont laissé 390 milliards d’euros sur leurs comptes courants au premier trimestre 2018, un record depuis 25 ans.
A la fin de l’année 2018, l’encours des dépôts à vue (ce qu’on appelle plus communément les comptes courants) des ménages français atteignait 390 milliards d’euros, selon une étude publiée par la banque BPCE et s’appuyant sur les données de la Banque de France. Les montants placés sur les comptes courants ont augmenté de 50 % depuis 2013 contre 4 % pour l’épargne. Comment expliquer cette prudence financière ?
Les Français se détournent du Livret A et des placements boursiers
Selon cette étude, le montant des dépôts à vue a presque doublé en dix ans. Ce phénomène peut s’expliquer par la baisse des taux de rendement du Livret A et la méfiance des Français vis-à-vis des placements boursiers.
Baisse du Livret A : le taux de rendement de ce livret réglementé est à son plus bas historique, à +0,75%/an soit moins que l’inflation. Rappelons qu’il était de +3,0% en 2008. Ce faible taux rebute les épargnants d’y laisser une part significative de leur épargne, et les incite à les laisser sur un compte bancaire qui a l’avantage d’être disponible à tout instant.
Méfiance des placements boursiers : investir une partie de son épargne en bourse est le meilleur moyen d’augmenter son espérance de rendement. Mais les épargnants français affichent une grande méfiance pour ces types de placement, accentué depuis la dernière crise financière. Bien que des professionnels comme Yomoni ou WeSave proposent de s’occuper de la gestion de leur épargne à leur place, la méconnaissance des marchés empêchent la majorité des français à s’y laisser tenter… Quitte de pas bénéficier d’une meilleure rémunération de leur patrimoine !
Alors vers quoi les épargnants français se tournent pour leurs placements moyen et long terme ? Principalement vers des assurances-vie investi en fonds euros et des fonds d’épargne salariale.
Une tendance observée dans d’autres pays européens
La France s’inscrit dans la ligne droite de ses voisins européens, les encours des dépôts à vue ayant notamment progressé en Italie, en Espagne, en Allemagne ou encore en Belgique. Cependant, l’Hexagone reste moins touché que ces pays car ses taux réglementés restent plus élevés que ses voisins, comme le PEL par exemple, ce qui a permis de mieux résister à cette tendance.
Dans l’Hexagone, les habitudes des Français ne devraient pas changer dans l’immédiat, les taux du Livret A étant gelés jusqu’en 2020. Effectivement, selon la BPCE, les épargnants préfèrent placer leur argent sur un compte courant par crainte d’un retournement du contexte économique. Une partie des personnes sondées invoquent également le plafond atteint de leur livret. Enfin, 1 Français sur 10 avoue ne pas placer son argent par « paresse » ou ne pas savoir le faire.
Un contexte incertain et moins dynamique
La banque BPCE prévoit un taux d’épargne plus élevé pour l’ensemble de 2018 (14,5 %) par rapport à 2017 (14,2 %). Ce chiffre s’explique par une baisse de la consommation ces derniers mois et une chute du moral des Français. BPCE prévoit une hausse du taux d’épargne à 15 % en 2019 malgré l’amélioration du pouvoir d’achat des ménages. L’instauration du prélèvement à la source devrait avoir un impact psychologique temporaire en incitant les Français à épargner davantage.
À moyen terme, d’ici la fin de l’année 2019, la banque anticipe une baisse du poids des dépôts à vue. Ceux-ci représenteraient 46 % du total des placements financiers hors titres, contre 47 % l’année précédente. Le poids de l’assurance vie pourrait en revanche passer de 33 % en 2018 à 36 % de ce total en 2019.
Le moral des Français en baisse depuis 2014
La crise des gilets jaunes et les signes de ralentissement de la croissance impactent le moral des Français. En décembre, l’indice de la confiance a atteint son niveau le plus bas depuis 2014, à 87, soit bien au-dessous de sa moyenne de longue période évaluée à 100, selon l’INSEE. Ainsi, l’année 2019 ne s’annonce pas sous les meilleurs auspices. L’institut de la statistique précise par ailleurs que la part de ménages estimant opportun de faire des achats importants retombe. C’est un coup dur pour le gouvernement qui misait sur ses dernières mesures en faveur du pouvoir d’achat pour relancer la consommation.