Jepargneenligne a invité Frédéric Arnaud, membre de l’équipe de gestion de la plateforme de prêt WeShareBonds, à partager ses conseils pour bien investir en crowdlending.
L’investissement en crowdlending offre la possibilité au grand public de prêter directement en ligne et en quelques clics à des dizaines de PME françaises. Les plateformes de crowdlending se sont multipliées ces dernières années et promettent toutes de sélectionner les meilleurs projets après une analyse approfondie.
Cette situation n’exonère cependant pas l’investisseur de se poser certaines questions notamment par rapport à ses propres objectifs personnels.
Gérer sa liquidité
La règle de base est de bien gérer son horizon d’investissement. Au moment de l’investissement, il faut être certain de ne pas avoir besoin de disposer des fonds prêtés sur la durée du prêt. Il n’existe en effet pas forcément de possibilité structurée (voir légale) pour céder la créance sur un marché secondaire et récupérer sa mise.
Par ailleurs, il faut savoir que si le produit est conservé jusqu’à échéance, le prêt sera remboursé à son prix d’origine (modulo le taux de défaut). Si l’on prévoit au contraire de le céder avant l’échéance, on subira un risque de variation défavorable du prix de rachat de la créance, qui reflétera les conditions de marché.
Afin d’améliorer votre liquidité, optez pour un prêt amortissable qui vous permettra de récupérer régulièrement une partie de votre investissement (et éventuellement de le réinvestir).
Appréhender le niveau de risque
Les prêts aux PME sont des produits présentant un niveau de risque élevé. Il faut donc être conscient qu’en cas de défaut, l’intégralité de la créance peut être perdue.
Placer en prêt de PME n’est pas un placement garanti (tel que pourrait l’être le livret A par exemple, ou bien certains contrats d’assurance-vie). A l’inverse, la rémunération brute proposée est supérieure.
Dans le domaine du crowdlending pour des PME, il semble certes que le couple risque/rendement soit plutôt favorable par rapport à ce que l’on pourrait trouver sur d’autres produits de taux.
Cela tient au fait que le prêt proposé offre d’autres avantages aux PME que l’aspect purement financier : rapidité de la prise de décision et de la disponibilité des fonds, pas de caution ou de prise de sûreté ce qui permet de combiner avec des prêts classiques bancaires traditionnels et de finaliser ainsi des projets de marketing et de communication dans le cadre de l’opération. Etant donné ces différents points évoqués, les émetteurs peuvent accepter de payer une légère prime dans le cadre de l’opération.
Les plateformes classent les projets par niveau de risque. Chez WeShareBonds par exemple, il existe une échelle de risque allant de A à E. Il faut être conscient que plus le taux proposé est élevé, plus le risque estimé est important et donc le taux de défaut potentiel lié (le taux d’intérêt est une fonction du risque estimé et de la durée du prêt).
Dans le cas de TPE ou de projet en phase d’amorçage, il n’existe pas forcément de possibilité rationnelle permettant d’appréhender finement ce risque.
La règle d’or : la diversification et la gestion active
Selon la sagesse populaire qui conseille de «ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier », une règle de bonne gestion consiste à repartir ses investissements et ses prêts entre plusieurs PME (voire plusieurs gérants).
Plus précisément, il faudra répartir ses avoirs sur des niveaux de taux plus ou moins élevés – sensés refléter le risque de chaque opération – et enfin s’intéresser à la notion de secteur : certains secteurs – voire certains business models -peuvent apparaître comme plus ou moins résiliant, cependant il ne serait pas forcément avisé de miser uniquement sur des prêts liés par exemple au secteur de la restauration. En cas de baisse de la consommation dans ce secteur l’intégralité du portefeuille risquerait d’être fortement impacté. Diversifier le portefeuille permet de lisser la performance, mais également de diminuer fortement le risque.
Enfin, en ce qui concerne la rémunération, les projets affichent un niveau de rémunération brute du prêt mais celui-ci (sauf remboursement in fine) est amorti régulièrement : ainsi du fait des remboursements réguliers une partie significative de l’épargne se retrouvera non placée. Pour maintenir un niveau absolu de rémunération, il faut penser à replacer régulièrement sur de nouveaux projets afin de maintenir son épargne constamment investie.
Bien choisir sa plateforme
La répartition peut aussi se faire entre différentes plateformes. Dans un premier temps il est important de s’assurer que la plateforme dispose d’un agrément (IFP ou CIP) sur le site de l’ORIAS.
Concernant la répartition de vos investissements, il peut y avoir des seuils ou limites d’investissement par projet du fait d’une limite légale ou d’une politique interne des plateformes. Il faut se renseigner au cas par cas afin de ne pas être amené à devoir multiplier les interlocuteurs et les plateformes.
La réputation de la plateforme est également importante (avis d’utilisateurs, couverture presse, nature des projets…) et les taux de défaut affichés (même s’ils ne présagent pas du futur) pourront donner des indications sur le sérieux de la plateforme qui vous accompagnera parfois pendant plusieurs années.
Effectuer ses propres diligences
Le filtre de la plateforme n’exonère pas d’effectuer ses propres diligences. Si l’on ne croit pas en l’activité ou que l’on ne comprend pas le « business » d’une société il est préférable de s’abstenir.
Dans tous les cas cela suppose de s’être assuré d’avoir eu un accès satisfaisant à l’information (site web de la société, note de l’analyste).
Se fier à son bon sens, privilégier les sociétés avec lesquelles on ressent une affinité, permettra sans doute d’éviter des investissements que l’on pourrait regretter par la suite.
A propos de l’auteur
Frédéric Arnaud est membre du Comité de Surveillance et de Stratégie de la plateforme de crowdlending WeShareBonds. Il est également un des co-fondateurs de Phillimore, un fonds d’investissement qui accompagne des PME dans leur croissance.
Très bon article.
Je verrai aussi un autre critère, c’est celui de vérifier si une plateforme est officielle et déclarée à l’ORIAS : point très important à préciser à tous les investisseurs pour susciter la confiance !
Dans quelles conditions ces dispositions pourraient – elles être réalisables en Afrique?